Quinze ans d’efforts continus
Les professionnels de la santé travaillant en équipe peuvent s’engager, de leur propre initiative, dans des approches coopératives pour mieux répondre aux besoins des patients. Grâce à des protocoles collaboratifs, ils transfèrent entre eux des activités ou des actions de traitement ou de prévention ou réorganisent leurs modalités d’intervention auprès du patient. Ce protocole de coopération, après avis de la HAS, pourra être mis en œuvre sur le territoire national. De plus, des expérimentations avec des organisations innovantes permettent de décloisonner le système de santé grâce à la collaboration entre professionnels. Des changements ont également été apportés aux décisions de compétences de nombreux professionnels (orthoptistes, masseurs-kinésithérapeutes, pharmaciens d’officine, biologistes médicaux, etc.)* et des pratiques avancées ont été développées pour les infirmières.
*La loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 et la loi n° 2023-379 du 19 mai 2023 renforcent l’accès aux services par la confiance dans les professionnels de santé.
Les résultats obtenus sont trop limités pour des mesures alliant qualité, sécurité et satisfaction
S’il est trop tôt pour mesurer l’impact de toutes ces réglementations, dont certaines sont encore nouvelles, les protocoles de coopération donnent déjà des résultats. Ainsi, d’ici fin 2023, 57 protocoles nationaux de coopération seront ratifiés. D’ici 2022, ils permettront à plus de 400 000 patients de bénéficier de près de 600 millions d’actes délégués. Ces résultats sont d’autant plus remarquables que très peu d’effets secondaires ont été rapportés (0,12 %) et qu’aucun effet secondaire grave n’a été rapporté. Concernant la qualité des actes délégués, un peu moins de 40 000 patients (9,1 %) ont été transférés vers des délégants, dont plus d’un tiers uniquement pour des protocoles d’échographie entre radiologues et techniciens en électroradiologie médicale. D’autres réorientations surviennent également simplement parce qu’elles sont stipulées dans le protocole[6]. Et si la satisfaction des patients n’a pas bénéficié d’évaluations standardisées, la satisfaction des professionnels impliqués est désormais évidente.
Cependant, l’application de ces protocoles est très variable : certains traitent plusieurs milliers de patients, d’autres ne traitent que quelques dizaines de patients. Le chiffre de 57 protocoles nationaux est encore faible. De plus, 106 protocoles locaux ont été adoptés sans que nous évaluions le flux des bénéficiaires, et très peu ont progressé vers une mise en œuvre nationale. Enfin, des barrières organisationnelles et financières freinent les progrès attendus. Ainsi, un récent retour d’expérience de la HAS révèle que, 21 mois après un avis positif rendu en mai 2022 sur le protocole de collaboration entre médecins et infirmiers pour la prise en charge à domicile de patients âgés ou âgés, en situation de handicap et de difficultés de déplacement pour se rendre chez le médecin, la rémunération du protocole n’est pas fixe.
En matière de pratique infirmière avancée, fin 2022, il n’y avait que 1 718 diplômés en 4 ans, bien loin de l’ambition affichée de 5 700 diplômés en 2027.
La HAS constate ainsi qu’à ce jour nous n’avons pas atteint tous les objectifs souhaités en matière d’amélioration de la prise en charge des patients, d’attractivité des métiers de santé et de réponse aux tensions dans l’offre de services. Et ce malgré la création de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et le potentiel du numérique en santé offrant de nouvelles opportunités de coopération et de répartition des tâches, adaptées à chaque territoire. Il est donc important de lever les principaux obstacles identifiés par les acteurs eux-mêmes ainsi que par la mission d’information ou d’évaluation :
Complexité administrative de mise en œuvre des protocoles de coopération ;
Insuffisance ou parfois absence de financements dédiés tant dans la mise en œuvre que dans l’évaluation des nouveaux modèles de coopération, tous modèles confondus ;
Manque d’accompagnement des équipes souhaitant s’engager dans un chemin collaboratif dont la dynamique dépend souvent des personnes qui l’initient ;
Nombre réduit de compétences partagées.
Changer de logiciel
La recherche de niveaux plus élevés de collaboration entre professionnels ne peut avoir un impact sur la qualité des systèmes de santé que si des changements logiciels robustes sont mis en œuvre. Nous avons une dette de gratitude envers nos concitoyens qui attendent des services et des parcours de soins de qualité. D’autant plus légitimes qu’ils financent le système de santé par les impôts, les cotisations sociales et les assurances complémentaires. Si l’on ne doit prendre qu’un exemple, lorsqu’un patient doit parfois attendre 6 à 8 mois pour accéder à un centre de traitement de la douleur, les protocoles de partage des tâches et de collaboration sont une solution puissante pour réduire la souffrance et améliorer la qualité de vie de plusieurs milliers de patients.
Concernant les protocoles de coopération, leur « vie administrative » doit être simplifiée. Lorsque la HAS promeut des recommandations en matière de parcours de soins, elle fait référence à la répartition des tâches, notamment basée sur des protocoles collaboratifs. La mise en œuvre de ces recommandations est largement déterminée par la mise en œuvre de ces protocoles de manière efficace, rapide et sécuritaire, au plus près des besoins de la communauté et des équipes professionnelles impliqu